À l’occasion du concours des Pyramides d’argent organisé par la Fédération des promoteurs immobiliers Hauts-de-France, Jean-Michel Sede, son président et directeur général de Loger Habitat, revient sur les tendances du secteur de l’immobilier. Pour mémoire, la FPI Hauts-de-France représente 38 adhérents ayant réalisé quelque 5 740 logements en 2021.
La FPI régionale vient de remettre ses Pyramides d’argent. Y a-t-il un dénominateur commun aux projets primés ?
Cela fait déjà un moment que nous observons une accélération de programmes de restructuration impliquant des changements d’usages, dans une logique de reconstruction de la ville sur la ville. C’est assez flagrant cette année. Comme par exemple, l’opération Fil’Harmonia à Croix, de Loger Habitat et Carré constructeur, celle de Vauban 27 avec la reconversion de l’ancien siège de Partenord pour l’IÉSEG. Nous sommes de plus en plus dans la couture urbaine.
Qu'est-ce que cela implique pour les promoteurs ?
Cela nous oblige à être de plus en plus pédagogue avec l’ensemble des parties prenantes. Il y a une certaine aversion à la construction et donc une difficile acceptation de l’acte de construire des citoyens. La crise du Covid a mis en évidence un besoin d’espace, de respiration. Et il y a beaucoup d’idées reçues quant à nos opérations, notamment sur la question de la densification. En témoigne l’opération que nous portons à Lesquin où nous transformons 20 000 m2. Certes, nous réalisons des logements, mais nous ramenons aussi de la diversité et de la nature sur un espace qui était jusqu’à présent imperméable. J’ajouterai que nos opérations sont de moins en moins en béton. Nous avons plus recours au bois, à des matériaux biosourcés et nous travaillons sur des matériaux issus de la déconstruction. Les filières se structurent, nous avançons sur ce chemin avec elles.
Quels sont vos leviers d’actions alors que le foncier disponible dans la Métropole Européenne de Lille se fait rare ?
Des terrains vierges, il n’y en a plus, ou alors déjà ciblés dans le PLU en discussion à la MEL. Les possibilités ont fortement été réduites avec la Loi climat et résilience et le zéro artificialisation nette (ZAN). Mais l’enjeu est surtout de savoir quelle densité nous voulons sur les projets. À nous de concevoir des produits avec une densité bien vécue. Néanmoins, je rappelle que nous estimons le besoin à 6 200 logements dans la Métropole Européenne de Lille. La MEL et les grandes communes ont toujours cette volonté de faire, mais il y a de fortes disparités entre les communes. Difficile d’avoir un règlement commun malgré des réalités diverses.
Quid du marché des villes moyennes ?
Le Dunkerquois s’en sort plutôt bien, notamment avec le programme Grand Large. La commercialisation se passe bien alors que la ville n’est plus éligible au Pinel. Idem pour Arras qui reste attractive par son cadre de vie. Le Valenciennois continue de fonctionner correctement et Amiens marche pas mal.
Dans quelle mesure êtes-vous impactés par la hausse du coût des matériaux ?
Le coût de la construction représente la moitié du prix de revient d’une opération. Ces hausses sont donc violentes, car nous sommes sur des cycles longs, parfois de plusieurs années. Aujourd’hui, les prix auxquels nous arrivons n’ont rien à voir avec ce que nous avions anticipé. Cela signifie qu’il nous faut parfois revoir les projets et donc réduire l’offre disponible sur le marché. La volatilité des prix peut conduire à certain attentismes des promoteurs et retarder le lancement d’opération. Sans compter les délais de construction qui s’allongent en raison des pénuries d’approvisionnement.
Dans ce contexte, quelles relations avez-vous avec les entreprises ?
On sent qu’elles sont très attentives à leur trésorerie, aux délais de paiement. Nous avons rencontré plusieurs fois la Fédération Française du Bâtiment pour discuter des modalités de révision des marchés. Chaque projet étant différent, nous privilégions le dialogue au cas par cas. Les entreprises sont nos fournisseurs, mais ce sont surtout nos partenaires.
Quelles sont vos perspectives pour l’année 2023 ?
Il y a une réelle flambée des contraintes - RE2020, enjeu de décarbonation, coût de l’énergie, temps long de sortie des projets. Mais on ne pourra pas les reporter indéfiniment sur les acquéreurs, eux-mêmes soumis à cela. L’incertitude réside donc dans le comportement des acquéreurs. L’enjeu est de juguler l’inflation, de stabiliser les prix pour avoir une vision à plus long terme et casser cet attentisme. Sachons toutefois profiter de cette période pour nous réinventer, notamment en matière de décarbonation.
Propos recueillis par Julie DUMEZ
Les légendes sont dans les photos.
Crédits : FPI Hauts-de-France
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